Article de Daniel Martin, 4 juillet 1999


LE VOYAGE DES DAMES

Au premier regard, c’est une drôle d’aventure que cette Expédition. Trois femmes partent pour le magazine « Elle » sur l’île de Pâques. Pas pour le plaisir volage du tourisme, ni le désir de rencontres. Mais pour y trouver le mystère du monde. Rien de moins. Une fois sur place, la réalité les submerge et le pauvre garçon qu’elles ont embarqué avec elles, comme homme à tout faire, n’y peut rien. Trop soudainement confrontées à un cadre immense, à un lieu mythique, aux dieux qui hantent encore cette terre chargée de mystères… Tout fout le camp sous leurs yeux, sous leurs pas, sous leurs doigts : les appareils tombent en panne, les cœurs chavirent, les idées se brouillent.

Et dans le même temps, ces personnages que Pierrette Fleutiaux campe d’abord à gros traits, s’affinent, se précisent, s’humanisent. Deviennent des silhouettes à la fois dérisoires et graves, ridicules et sensibles qui mènent des combats perdus d’avance, courent après des idéaux très flous, s’entravent et chutent. Elles sont à l’image de l’humanité. Voilà qui donne une grande ambition au roman, une grande envergure. Qui peut dérouter. Qui mérite quelques explications. L’occasion d’une rencontre.

 Le livre vous paraît déroutant? Mais c’est l’île elle même qui déroute, elle n’est sur aucune voie maritime. Pour moi, tout est parti d’un voyage que j’ai fait là bas sur un coup de tête, voici deux ans. De cette rencontre. J’ai découvert un lieu totalement à l’écart, c’est tellement vrai que pendant longtemps les populations qui vivaient là étaient persuadées d’être uniques au monde. Un lieu étrange, mythique, idéal en somme pour se poser les questions de base, la vie, l’amour, la mort. Et de quoi la littérature est elle faite sinon de ça ?

Un autre facteur déterminant aura été la lecture des récits de voyage de Lapérouse. J’ai ressenti une sympathie immédiate pour son écriture. Dès que je l’ai lu, j’ai trouvé mon bateau, ma voie, mon intrigue. Je me suis embarqué dans ce roman avec ce plaisir supplémentaire de jouer avec le style du XVIII°. A quoi est encore venu s’ajouter toute une série d’hommages à d’autres auteurs, Heyerdahl, l’homme du Kon-Tiki, qui s’est beaucoup intéressé à l’île de Pâques, Bougainville… La présence d’une équipe de C.N.R.S. dans le roman, présence important ortarate, puisque cette é sert de déclencheur dans on histoire. Vient aussi de là, de ces longs voyages qui se faisaient toujours à deux bateaux. Je voulais que les trois femmes évoulent par rapport à une autre équipe, sous un autre regard. »

 Daniel Martin, le 4 juillet 1999.